Il y a deux ans, la petite Mawda était tuée, dans le contexte des opérations Médusa lancées par le gouvernement MR-NVA avec Theo Francken pour poursuivre les migrants aux frontières. Justice n’a pas encore été faite.
Michel Bouffioux, journaliste qui mène l’enquête depuis deux ans :
« Cela s’est passé près de vous. Il y a 2 ans maintenant. Dans la nuit du mercredi 16 au jeudi 17 mai 2018, sur une autoroute belge, près de Mons, un policier tirait un coup de feu en direction d’une camionnette transportant des migrants. Mawda, une petite fille de 2 ans, touchée en pleine tête, était tuée.
J’éprouve énormément de courroux quand je pense à « l’affaire Mawda ». Les faits sont révoltants. Une enfant est morte victime d’une balle, victime aussi d’un contexte politique, d’une société où l’on gère la migration par des « opérations Médusa », des chasses aux « illégaux ».
Malgré un certain discours populiste, il n’y avait aucune raison légitime de tirer sur la camionnette en mouvement. Se sont ensuite ajoutés des comportements suspects de certains policiers dans les premières heures de l’enquête, notamment la rédaction d’un procès-verbal abracadabrant (thèse de l’enfant-bélier), une communication partisane du Parquet de Mons et in fine une instruction essentiellement centrée sur un « incident de tir », ne cherchant pas à éclairer certaines zones d’ombre. Par exemple, sur ce qui s’est passé sur le parking, juste après le tir.
La justice a renvoyé ces éléments dérangeants vers le Comité P (service de contrôle des polices), lequel a mené une enquête très « collaborative », largement insuffisante. La commission du parlement (composée de partis de droite, du centre, de gauche et de nationalistes), auquel le Comité P rend compte, ne s’en est pas du tout indigné. Tant il est vrai que cette commission s’est scandaleusement peu investie dans ce dossier autorisant de facto une défaillance du contrôle de l’action policière.
Ce qui est révoltant dans cette affaire, c’est le tir, le contexte du tir, la mort d’une enfant, mais aussi le constat qu’après ces faits aucun contrepouvoir n’a pleinement rempli son rôle.
Mais inévitablement viendra ici aussi un « déconfinement ». Quand il y a aura un procès public, tout sera mis au jour… Ce « tout » ne sera sans doute pas la pleine vérité sur les faits qui se sont déroulés durant cette nuit tragique de mai 2018. Mais, inévitablement, on saura alors toute la vérité sur la nature de l’enquête menée par la justice, les questions qu’elle aura abordées, les questions qu’elle aura laissées en suspens.
Les constats que l’on fera au moment du procès public s’annoncent amers. A moins d’un sursaut de la magistrature ? Ce serait utile pour la crédibilité de nos institutions qui se sont se déshonorées dans ce dossier, il est vrai peu « populaire » au temps des Trump, des Salvi et autres De Wever, peu rentable électoralement.
J’invite aussi à cette réflexion : n’est-ce pas la même idéologie qui conduit à sous-financer des hôpitaux, à sous-financer la justice financière qui traque la fraude fiscale, à démanteler les services publics et à organiser des chasses aux migrants ? «
