Pauvreté, flexijobs, pensions et attaques sur nos services publics tandis que des multinationales continuent de ne pas payer d’impôts et que Charles Michel & co gagnent plus de 11 000 euros par mois : le mécontentement de la population augmente et Michel le sent. Pour détourner la colère des gens, Michel couvre la politique du secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration Theo Francken qu’il qualifie même de « humaine ». Fact-check des propos de Michel à propos de la politique migratoire lors de son discours à la Chambre du 10 octobre dernier.
Soudan : le gouvernement belge viole les droits de l’Homme
« Nous remplissons nos obligations internationales » a affirmé Charles Michel, qui a cependant « oublié » de parler de l’accord avec le Soudan. Pour rappel, Francken a fait venir une délégation du Soudan en septembre afin de venir identifier les réfugiés soudanais et ainsi pouvoir les y renvoyer. Une délégation composée selon de nombreux témoignages par des agents des services secrets soudanais venus « récupérer » leurs opposants politiques en Belgique afin de les ramener dans les chambres de torture au Soudan. Malgré la promesse de Charles Michel devant le Parlement le 26 septembre dernier qu’aucun Soudanais ne serait renvoyé par la Belgique s’il était effectivement exposé à la torture ou à des traitements inhumains et dégradants, le Tribunal de Première Instance de Liège a dû annuler tout renvoi de réfugiés vers le Soudan il y a 2 jours. Parce que, justement, les décisions de renvois n’étaient pas évaluées au regard de l’article 3 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme qui interdit de soumettre des gens à la torture ou à des traitements inhumains et dégradants, ce qui pourrait être le cas en cas de renvoi vers le Soudan.
Ces faits appellent de nombreuses questions. Sur quelles informations se basaient Charles Michel le 26 septembre lorsqu’il affirmait qu’une évaluation au cas par cas était organisée ? Comment l’administration de Francken évalue-t-elle concrètement le risque d’être exposé à la torture et de traitements inhumains et dégradants en cas de retour ? Comment cela se fait-il que cette évaluation n’a tout simplement pas eu lieu dans un certain nombre de cas avéré ? Pourquoi les ordres de quitter le territoire n’ont-ils pas été réévalués au regard de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme ?
C’est à ces questions que les nombreuses ONG actives sur le terrain attendaient une réponse de Charles Michel hier. Mais elles n’en ont reçu aucune. Le Premier ministre n’a par contre pas manqué d’accuser ceux qui dénoncent l’action du gouvernement de « mensonges et de désinformation ».
La politique ferme et hypocrite de Michel
« Nous n’avons aucune leçon à recevoir », affirme le Premier ministre Charles Michel. « Depuis le début de la crise des réfugiés en 2015, nous avons accordé une protection à plus de 35 000 réfugiés ». Lorsqu’une personne fuyant la guerre et les persécutions arrive en Belgique, elle doit déposer une demande d’asile. Cette demande est alors évaluée afin de vérifier si cette personne dit vrai. Or, ces trois dernières années, l’augmentation et l’aggravation des conflits dans le monde a poussé de plus en plus de gens sur les routes. En Belgique, ces trois dernières années, 60% des demandes d’asiles ont été jugées positives. Cela signifie que 60% des personnes demandant l’asile en Belgique ont reçu le statut de réfugié leur donnant le droit de rester en Belgique. Si le nombre de protections internationales accordées reste cependant plus élevé que sous la législature précédente, c’est uniquement parce que les personnes arrivant en Belgique fuient effectivement la guerre et les persécutions et que la Belgique est obligée de leur offrir une protection, conformément à la Convention de Genève relative au statut de réfugié.
C’est précisément pour cela que Theo Francken et ses collègues au niveau européen font tout pour empêcher que ces personnes puissent déposer leur demande d’asile en Europe et en Belgique. C’est précisément pour cela que Francken a effectué sa politique de « #nettoyage » dans le parc Maximilien afin de chasser les personnes de la Belgique.
Si la Belgique enregistrait en 2015 44 660 personnes demandant l’asile, ce chiffre tombe en effet à 18 710 en 2016, soit le chiffre le plus bas depuis 2008. Cette année, 11 236 demandeurs d’asile ont déposé une demande de protection internationale, soit encore moins qu’en 2016 à la même période.1 Cela est dû à la politique de fermeture des frontières au niveau européen, en particulier suite aux accords avec la Turquie en mars 2016 d’une part, et la Libye cette année d’autre part. Des accords pourtant jugés contraires au respect des droits de l’Homme par différentes ONG active sur le terrain.
Si la Belgique a offert une protection à 35 000 personnes sous cette législature, ce n’est donc pas grâce à la politique du gouvernement Michel mais plutôt malgré elle.
Charles Michel sait que la politique de Theo Francken devient de plus en plus impopulaire auprès d’une partie de la population, et tente ici de concilier l’inconciliable : d’une part, couvrir la politique de « #nettoyage » et l’accord avec le Soudan, d’autre part, donner un visage humain à sa politique en affirmant que la Belgique accueille plus de réfugiés que jamais. Politique politicienne. « Nous menons une politique une politique migratoire humaine mais ferme » affirme le Premier ministre. « Ferme mais hypocrite » serait cependant plus juste.
Michel a besoin de Francken
Comme l’expliquait le président du PTB Peter Mertens lors de son discours à ManiFiesta, Francken « prêche la haine jour après jour afin de nous faire avaler restriction sur restriction ». Diviser pour régner et cacher l’évidence.
L’évidence que la pauvreté augmente chez les femmes et les enfants. L’évidence que le gouvernement veut une nouvelle fois s’attaquer à nos pensions avec 300 millions d’euros de coupes à la clé. L’évidence que les flexijobs vont rendre la vie impossible aux jeunes. L’évidence que ce gouvernement s’attaque aux services publics et aux soins de santé. L’évidence que les grosses multinationales ne paient (presque) pas d’impôts. L’évidence que les taxes contre les grosses fortunes en Belgique se réduisent à chaque fois à des pétards mouillés. L’évidence que Charles Michel & co vivent déconnectés de la population avec des salaires de plus de 11 000 euros par mois, sans compter leurs nombreux mandats extra.
Charles Michel sent que sa politique devient de plus en plus impopulaire et a besoin de la politique de Francken pour détourner la colère de la population vers les étrangers et les réfugiés. « Nous ne voulons pas qu’on sème la haine. Nous ne voulons pas que le simple citoyen paie. Nous voulons que les multinationales paient comme tout le monde », concluait Peter Mertens à ManiFiesta.